La Gaani de Nikki est une fête traditi
onnelle, culturelle et cultuelle dont l’origine remonte à plus de huit siècles. Elle s’est toujours déroulée sous l’autorité de l’empereur de Nikki qui a règne dans le temps sur des populations de diverses origines ethniques et socioculturelles. L’influence de l’empire de Nikki s’est étendue dans le temps, particulièrement sur la majeure partie du nord du Bénin actuel et au-delà des frontières nationales jusqu’aux confins du Niger, du Nord Togo, sur une partie du Nord-Ouest du Nigeria allant de Bussa au Nord à la limite de Saki vers le Sud passant les localités de Kaïma, Yashikira, Okuta, Ilesha, Kishi, Igboho etc. dont certains chefs traditionnels se reconnaissent jusqu’à ce jour sous l’autorité de l’empereur de Nikki, tout au moins au plan protocolaire. L’étendu de cet empire serait trois fois plus grand que la superficie de l’actuel République du Bénin.
« « La Gaani a été conçue depuis ce temps, comme un moment de ralliement et de symbiose socioculturels de toutes les entités qui se reconnaissent sous l’autorité de l’empereur de Nikki.
Ainsi, tous les ans, le douzième jour du troisième mois du calendrier lunaire, toutes les chefferies traditionnelles se retrouvent à Nikki avec tous leurs atouts socioculturels et économiques pour diverses activités socio-économiques sous fonds de réjouissance culturelle.
Les différentes phases d’organisation de la Gaani s’étalent sur trois mois. Ces mois sont dédiés à la Gaani et porte son nom : le ‘’Gaani gobi kasso’’ mois des préparatifs ; le ‘’gaani suru’’ mois du déroulement de la Gaani et le ‘’gaani ban’na’’ l’après Gaani.« `
1. Les préparatifs de la Gaani :
Depuis lors jusqu’à nos jours, un mois complet est dédié aux préparatifs de la Gaani ; c’est le deuxième mois de l’année lunaire ou ‘’ Gaani gobi kasso’n suru’’. Au cours de ce mois, l’empereur organise une tournée dans les différentes contrées attachées à son autorité pour convier les différentes communautés et en même temps solliciter leurs contributions matérielles ou financières pour l’organisation, la réussite et le succès de cette fête. Pendant ce temps, les princes, princesses, dignitaires et les autres communautés se mettent également en activités intenses afin de trouver les ressources nécessaires pour faire face aux besoins de la fête. C’est également au cours de cette période que les gardiens de la paix et des traditions occultes font leurs prières afin que la fête se déroule dans le calme et la sérénité totale.
2. Le déroulement de la Gaani :
Les différents rois, chefs de province de l’empire de Nikki prennent toutes leurs précautions pour s’y rendre par tous les moyens notamment le cheval et même à pieds.
_La Gaani proprement dite s’organise sur trois jours. La veillée ou sortie des Tambours sacrés, le jour ‘’J’’ ou ‘’Sonniru’’ et le lendemain de la fête ou KAYESSI.
La veille ou ’sankiru’’ :
Au soir du onzième jour du troisième mois lunaire au tour de 17heures, les tambours sacrés et les trompettes du Sinaboko sont mis en place, à la Cour du Palais Imperial.
Il y a une veillée toute la nuit aux rythmes des sons tambours sacrés ‘’bara bakanu’’, des trompettes ‘’kankagui’’ et des tam-tams des griots : c’est le ‘’sankiru’’ ou le ‘’kwanan zauna’’. Il s’agit pour les griots de faire les éloges des défunts empereurs et des dignes princes et principautés qui ont fait la gloire de cet empire depuis des lustres.
Le jour de la fête ou ‘’Sonniru’’ :
• Le douzième jour du troisième mois lunaire, dès que le soleil quitte le zénith (entre 12h 30 et 14h) son Altesse Imperial le Sinaboko sort du palais Impérial ; c’est le début du long parcourt rituel d’environ onze kilomètre (11km) pour visiter des lieux historiques saints et sacrés. Le cortège qui accompagne le Sinaboko est composé du Sina Dunwiru (à lavant garde du cortège), d‘une équipe de griots ‘’Ganku et barͻbu’’, du ‘’Bah Agban’’, des ministres de la cour impérial, des trompettistes, d’une foule de cavaliers, des populations et des touristes.
• Les sites visités sont dans l’ordre : les Tambours sacrés ou ‘’Barabakanu’’, la mosquée de l’Imam central, le grand tas d’ordure ou ‘’Too gnanku bakaru’’, ‘’Dakiru’’, ‘’Batiaru’’, le Palais de la dynastie Lafiaru (actuel musée) ou repose l’empereur Kpé Lafia Gambaru et bien d’autres, les Tambours sacrés pour une deuxième fois, ‘’Bakpilu’’, les tambours sacrés pour une troisième fois et enfin l’empereur se retire dans sa case ronde après une toilette sacrée.
• A la suite de son Altesse Imperial, la Reine Mère, les chefs de province, les dignitaires ‘’Yérima’’ et ‘’Gobi’’ suivis des autres princes et princesses, suivant leurs générations et suivant leurs grades, entrent à la cour devant les tambours sacrés accompagnés des trompettes pour faire leur ‘’faro’’
• La fête continue à travers la ville jusqu’à l’aube à travers des chants et danses traditionnelles.
Le lendemain : la ‘’kayessi’’
• Au tour de 09heures à la cours, se réunissent les hauts dignitaires de l’empire accompagnés des princes et princesses pour rendre allégeance à son Altesse Impérial le Sinaboko et discuter des différents problèmes qu’ils rencontrent dans leurs différentes localités.
• Pendant ce temps, chez la Reine Mère, les princes et princesses se font baptiser en prenant un deuxième prénom tel que Séro, Kora, Simé, Gounou, Lafia, Yarou etc. pour les garçons et Gniré, Gannigui, Bèkègui, Mannou etc. pour les filles.
• La fête prend fin tard dans la nuit.
3. Apres la fête : ‘’Gaani banna’’
Les festivités terminées, les ‘’Gaani nan’’ (appellation des pèlerins de la Gaani) retournent chez eux.
C’est la période des salutations et remerciements. L’on se souhaite bonne année et bonnes retrouvailles pour la Gaani prochaine, que l’on souhaite meilleure que celle qui vient de finir. C’est la période de nettoyage pour les habitants de la cité historique de Nikki.
La Gaani, identité culturelle des Barubibu et fête de trône des wassangari, est l’une des traditions ancestrale de notre pays, le Bénin, qui a été conservée nonobstant l’influence de la colonisation française et même celle de la révolution en raison de ses valeurs, notamment le rapprochement des peuples et des cultures qu’elle incarne.
Par Mr. Gounou Bachirou SARIKI IMOROU